Alain Rayes ou comment perdre des votes au Québec

Maxance Vincent
8 min readAug 28, 2019

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Le député de Richmond-Arthabaska et Lieutenant Politique du Québec au Parti Conservateur du Canada, Alain Rayes.

Souvenez-vous de l’entrevue à 24/60 au treizième jour de la campagne électorale fédérale de 2011, où Jacques Gourde, député Conservateur de Lévis-Lotbinière, avait répété sans cesse la même réponse préparée et apprise par coeur sans répondre intelligemment aux questions d’Anne-Marie Dussault sur le dossier du Pont Champlain? Alors que Jacques Gourde est maintenant devenu célèbre pour ses interventions éloquentes et pures à la chambre des communes en déclarant que “LES CANADIENS VEULENT SAVOIR LA VÉRITÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉ”, Alain Rayes, député Conservateur de Richmond-Arthabaska et Lieutenant Politique du parti pour le Québec a voulu s’expliquer sur ses propos contradictoires hier à 24/60 en compagnie de Mélanie Joly (Ahuntsic-Cartierville) du Parti Libéral du Canada, Alexandre Boulerice (Rosemont-La Petite Patrie) du NPD et Xavier Barsalou-Duval (Pierre-Boucher — Les Patriotes — Verchères) du Bloc Québécois. Alain Rayes, le surnommé “Maire du développement durable”, celui qui est le plus à gauche des conservateurs; qui partage les mêmes valeurs que Sylvie Fréchette, selon elle, vient de s’enfoncer les deux orteils dans des clous.

Pour ceux qui ne le savent pas, la position du chef du Parti Conservateur, Andrew Scheer, sur l’avortement est claire. Personnellement, Scheer est contre l’avortement. S’il est Premier Ministre, lui-même ne rouvrira pas le débat sur l’avortement. Cependant, il a toujours dit qu’il autoriserait un député à déposer un projet de loi privé anti-avortement si cela était pertinent à leurs yeux, mais aimerait encourager les députés à se concentrer sur des sujets qui unissent les Canadiens au lieu de le diviser. Alain Rayes dit le contraire: Il a répété sans cesse à 24/60 et à des candidats tels que Jessica Ebacher et Sylvie Fréchette que le dossier de l’avortement est en quelque sorte “mort” et le parti Conservateur ne rouvrirait pas le débat sur l’avortement, alors que son chef dit le contraire. La phrase que M. Rayes répète sans cesse est la suivante:

Un gouvernement Conservateur ne rouvrira pas le débat sur l’avortement, ne déposera pas de projet de loi sur le sujet, on veut travailler sur des enjeux qui unissent les Canadiens et Canadiennes. On ne veut pas tomber dans ces chicanes-là.

Alors que cette phrase peut bien être clair sur le point de vue des candidats Québécois et/ou d’Alain Rayes, un problème fondamental guide cette phrase: quelle est l’opinion d’Andrew Scheer sur ce sujet? Car, à ce que je sache, il n’a pas changé d’avis sur sa position sur l’avortement. Je vais répéter ma cassette comme M. Rayes pour que ce soit “bien clair”, Scheer lui-même ne rouvrira pas le débat, mais donne la permission à ses députés d’arrière-ban de présenter un projet de loi antiavortement privé s’ils le veulent le faire.

I believe 100% that Members of Parliament have the right to bring forward and debate any legislation of importance to them….Moreover, I have committed that all votes on matters of conscience be free votes.

Je crois que cette affirmation est assez claire. Alors que Alain Rayes peut dire la magnifique phrase: Un gouvernement Conservateur ne rouvrira pas le débat sur l’avortement…. autant de fois qu’il le veut sur 24/60 au lieu de répondre clairement à des questions qui, selon moi, sont très simples à répondre (à moins qu’on ait un agenda caché) pour éclaircir les électeurs, rappelons-nous ce qui s’est passé dans la chambre des communes le 29 Mai dernier.

Le 29 mai, la députée bloquiste de Repentigny, Monique Pauzé, a déposée la motion suivante, en demandant l’appui unanime des parlementaires:

Que la Chambre des communes réitère que le corps de la femme n’appartient qu’à elle seule et reconnaisse son libre choix en matière d’avortement. Pour quelque raison que ce soit.

Je vous invite à regarder cet extrait vidéo avant de poursuivre notre réflexion:

Qui la huait? Qui ne s’est pas levé et applaudit dans cette vidéo? Les Conservateurs d’Andrew Scheer. Où est assis Alain Rayes? À côté de Candice Bergen (Portage — Lisgar), qui elle est assise à côté de Monsieur Scheer. Est-ce que vous voyez Alain Rayes, ou n’importe quel député Conservateur debout, soutenant une motion qui est, selon beaucoup de gens, fondamentale au droit des femmes? Les femmes peuvent faire ce qu’elles veulent avec leur propre corps. L’avortement est un choix indépendant et les raisons qui poussent les femmes à vouloir avorter sont personnelles (quoique multiples) et devraient rester personnelles.

En bas à droite, à côté d’Andrew Scheer, Candice Bergen. La personne qui est à côté d’elle à sa droite est Alain Rayes, assis en jasant, de se lever et d’applaudir une motion qui devrait faire l’unanimité.

Comme vous le voyez dans cette image, tout le monde soutient ce que Monique Pauzé a dit, sauf les Conservateurs, qui prétendent qu’ils n’ont pas entendu ce qu’elle a dit à propos du corps de la femme. Pensez-vous qu’un commentateur politique comme moi est assez naïf et/ou crédule de croire les propos d’Alain Rayes, alors que ces propos qu’il répète sans cesse comme une cassette brisée ne complémentent pas ces gestes au Parlement? Qui est le chef des Conservateurs? À ce que je le sache, ce n’est pas Alain Rayes, mais Andrew Scheer. Andrew Scheer est contre le mariage LGBT et l’avortement et a même été appuyé par la droite religieuse pro-vie lors de la course à la chefferie du parti en 2017.

Où était Andrew Scheer à la parade de la fierté à Montréal le 18 août dernier? François Legault, Pierre Arcand, Manon Massé, Pascal Bérubé, Jagmeet Singh, Justin Trudeau, Yves-François Blanchet et Elizabeth May étaient présents. Ah oui, il y avait des candidats Conservateurs du Québec présent, dont Alain Rayes. Mais où était le chef? Où était le leader du parti qui a prononcé des phrases comme “I have always voted in favor of pro-life legislation” ou:

Two members of the same sex may use their God-given free will to engage in acts, to cohabit and to own property together. They may commit themselves to monogamy. They may pledge to remain in a loving relationship for life. In that sense, they have many of the collateral features of marriage, but they do not have its inherent feature, as they cannot commit to the natural procreation of children. They cannot therefore be married.

Ah mais “Alain Rayes était présent à la parade de la fierté”. Ok, mais Alain Rayes, lui, comme individu, a des valeurs qui sont contradictoires à son chef. Le “maire du développement durable” qui possède une voiture électrique, qui fait bien son recyclage & compostage, qui supporte personnellement les droits LGBT et de l’avortement et dit, en recrutant ses candidats qu’un gouvernement Conservateur ne rouvrirait pas le débat sur l’avortement en crédulant des candidates comme Sylvie Fréchette ou Jessica Ebacher, à la place de bien représenter le point de vue du CHEF sur l’avortement et qu’est-ce que le CHEF a dit à milles reprises à propos de l’avortement. Comme le dit François Legault: “C’est beau les discours. Mais dans la vraie vie, là, faut agir.”

Ce qu’Alain Rayes dit est le contraire de ce qu’Andrew Scheer dit. On peut sous-entendre un double discours, tactique politique bien connue des Conservateurs (rappelons-nous des érections à répétitions que promettait Stephen Harper: Une cinquième érection avant que la quatrième soit terminée). Blague à part, regardez le vidéo d’Andrew Scheer sur sa page Facebook à propos de son plan pour les Canadiens et/ou les Québécois. En Anglais, “he has a plan for Canadians”, alors qu’en Français, “il a un plan pour les Québécois”, en excluant le fait que les Québécois font aussi parti du Canada et en les traitant comme une province (ou un pays!) à part entière. Un militant politique qualifie ce double discours de “pathétique” et songe à ne plus voter pour le Parti Conservateur, alors qu’il est évident que Scheer joue le jeu le plus connu en politique: l’achat de votes. On dit une chose à une population, et le contraire à une autre pour le simple achat de votes. Les électeurs non-crédules savent à quel point cette tactique peut causer un climat de peur ou d’inquiétude, car nous ne savons pas ce que fera le parti lorsqu’au pouvoir. Vous pouvez me répéter encore la magnifique phrase préparée et apprise par coeur sans cesse, les droits fondamentaux doivent être respectés. Vous ne pouvez même pas me payer pour voter Conservateur.

Mais alors, je vais voter pour qui? Certainement pas pour Justin Trudeau ou Andrew Scheer.

Mon choix est fait: Je voterai pour le Bloc Québécois lors des élections fédérales en Octobre. Vous pouvez m’essayer de convaincre que le Bloc n’est pas le bon choix — des tendances d’extême-gauche communiste avec l’investiture d’André Parizeau, l’appui ferme de PKP (le poing 2.0?). Je m’en contrefous: André Parizeau n’est pas mon candidat, alors à quoi bon m’inquiéter? J’en ai le complet ras-le-bol des “vieux partis” qui se chicanent et font un double-discours pour différentes provinces pour acheter des votes. Justin Trudeau est une honte nationale au Canada, mais le double discours d’Andrew Scheer m’inquiète encore plus. Le Bloc Québécois est le seul parti qui a toujours respecté les Québécois et ont su défendre leurs intérêts avec brio lors de la dernière législature après l’élection d’Yves-François Blanchet comme chef. Le Bloc s’en allait dans le gouffre total avec Martine Ouellet. Aujourd’hui, elle pourrait détenir la balance du pouvoir lors du prochain scrutin.

Vous êtes un électeur? Informez-vous avant de faire le vote stratégique “Justin Just-Out” en élisant un gouvernement de cassettes contradictoires avec un double discours et un agenda caché. Alain Rayes peut être le “député du développement durable” qui emmenerait peut-être un “virage vert” à un parti pro-exploitation des sables bitumineux et oléoducs avec Captain Alberta Andrew Scheervangelist comme Premier Ministre qui fera tout pour aider ses amis de la droite religieuse et de l’Ouest Canadien, en ignorant les Québécois, peut-être à l’exception du troisième lien qui pourrait (ou non) avoir un péage (j’entends une réponse claire de Monsieur Steven Blaney à ce sujet).

Pourquoi avons-nous besoin de laïcité, vous dites? Justement, pour séparer et empêcher l’extrême-droite religieuse d’intervenir (et/ou de manipuler) les affaires de l’État.

Mon seul souhait pour vous, cher lecteur, en cette période électorale est d’être informé avant d’aller voter. Ne faites pas le coup de 2014: “je vote PLQ parce que je veux pas de référendum”, car vous allez regretter votre choix. VOTEZ avec conviction, VOTEZ avec conscience, VOTEZ avec votre coeur, VOTEZ pour VOS valeurs, NE VOTEZ PAS pour X “par principe” ou “parce que je ne veux pas X comme PM”. VOTEZ comme si votre vie en dépendait. Soyez intelligent et informé dans votre vote. Le vote stratégique ne fonctionne pas et n’a jamais fonctionné. Ce qu’il importe c’est que vous votez pour la personne et la plateforme qui vous représente le mieux, tout en étant informé.

N’enculez pas les mouches et allez voter le 21 Octobre.

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Maxance Vincent
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Written by Maxance Vincent

I currently study film and rant, from time to time, on provincial politics.

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